Bayonne, située au confluent de l’Adour et de la Nive, au cœur du Pays basque, possède un patrimoine urbain singulier. Classée Ville d’Art et d’Histoire depuis 2011 (Ministère de la Culture, 2011), elle conserve un tissu bâti ancien très bien préservé, caractérisé par ses venelles étroites, ses façades hautes et colorées, et ses alignements de maisons serrées, hérités du Moyen Âge et de la Renaissance.
Grand Bayonne : le cœur historique de la ville
Le Grand Bayonne correspond au noyau originel, celui du castrum romain établi entre le Ier et le IIᵉ siècle. À partir du Moyen Âge, des maisons étroites et profondes se construisent dans ce secteur, souvent sur plusieurs niveaux, avec un commerce au rez-de-chaussée et un logement dans les étages, un modèle encore visible rue Poissonnerie, rue d’Espagne ou rue Port-Neuf.
Les maisons à arcades de la rue Port-Neuf
Jusqu’au XVIIᵉ siècle, Bayonne était parcourue de canaux servant au commerce fluvial. La rue Port-Neuf était autrefois un canal comblé plus tard. Les maisons à arcades qui l’encadrent reposent sur pilotis en chêne, enfoncés dans les terrains humides : une technique traditionnelle bien attestée (Inventaire général du patrimoine culturel, Région Nouvelle-Aquitaine). Leur architecture mêle :
- pans de bois parfois en croix de Saint-André,
- bardage bois peint en rouge « sang de bœuf », vert sapin ou bleu basque,
- volets à persiennes adaptés au climat,
- galeries et balconnets en fer forgé.

Rue d’Espagne : verticalité et élégance urbaine
Voie commerçante ancienne, la rue d’Espagne présente une particularité : des maisons hautes et étroites, parfois larges de seulement 4 à 5 mètres, mais profondes jusqu’à 30 mètres. Elles s’étagent sur 4 à 6 niveaux, avec un plan identique : boutique en bas, puis habitation. Les garde-corps en fer forgé et heurtoirs des portes témoignent du savoir-faire des artisans locaux.
Maison Moulis : un joyau Renaissance
Située rue du Pilori, la Maison Moulis est l’une des demeures les plus connues de Bayonne. Classée monument historique en 1997 (Base Mérimée, PA00104607), elle est remarquable par :
- sa façade mêlant pierre calcaire et pans de bois sculptés,
- ses fenêtres à meneaux et croisillons typiques de la Renaissance,
- ses solives décorées,
- un décor sculpté rare dans la région.
Elle a fait l’objet de plusieurs campagnes de remaniements au XIXᵉ siècle, qui ont contribué à son aspect actuel. Ces transformations ont notamment concerné la restructuration intérieure et la réfection des façades, afin de l’adapter aux usages bourgeois de l’époque. Malgré ces modifications, la Maison Moulis conserve une grande partie de son vocabulaire décoratif d’origine.



Entre pierre et colombage : une architecture identitaire
Contrairement à une idée répandue, Bayonne n’est pas uniquement une ville de maisons labourdines. Son architecture est urbaine mais elle intègre également des codes basques régionaux.
Deux grands types de maisons dominent dans cette ville :
| Type de maison | Matériau principal | Particularités |
|---|---|---|
| Maison en pierre | Maçonnerie de pierre locale et enduit | Balconnets en fer forgé, encadrements de fenêtres soignés |
| Maison à pans de bois | Ossature bois + remplissage torchis ou brique | Colombages apparents peints, enduits à la chaux |
Ces maisons affichent des couleurs codifiées : rouge brun (issu de l’oxyde de fer), vert forêt ou bleu profond. Ces teintes traditionnelles sont aujourd’hui protégées par la charte coloristique de Bayonne adoptée par la Ville et les Architectes des Bâtiments de France.


Les quais de la Nive : façades emblématiques
Les quais de la Nive, notamment le quai Galuperie et le quai des Corsaires, offrent l’alignement le plus emblématique de Bayonne. Les maisons y sont hautes, souvent en emboîtement, avec des galeries fermées par des menuiseries peintes. Ce paysage fluvial est l’un des plus photographiés des Pyrénées-Atlantiques et a longtemps servi de carte postale urbaine du Pays basque.

Un urbanisme façonné par l’histoire et l’exil basque
Aux XIXᵉ et XXᵉ siècles, plusieurs vagues d’exilés basques venus d’Espagne se sont réfugiées à Bayonne, notamment après la guerre carliste (1833–1876) puis sous la dictature franquiste dès 1939. Ils ont contribué à développer de nouveaux métiers (imprimerie, chocolat, commerce maritime) et à densifier les quartiers aux rues étroites perpendiculaires aux quais.
Particularités architecturales bayonnaises
On retrouve dans l’architecture bayonnaise plusieurs éléments récurrents :
- Avant-toits sculptés appelés karrika burua en basque,
- Fenêtres à meneaux héritées de la Renaissance,
- Enduits à la chaux respirants adaptés au climat humide,
- Lucarnes et toits à deux pentes, parfois couverts de tuile canal,
- Escaliers intérieurs étroits et maisons profondes.
Ce tissu urbain dense est aujourd’hui protégé par un Site Patrimonial Remarquable (ancien secteur sauvegardé), institué en 2015 (Ministère de la Culture).

















