Le Bangladesh, pays marqué par une histoire riche et des traditions séculaires, est aussi un territoire où les conditions économiques et environnementales ont façonné les pratiques de construction. Parmi ces pratiques, les maisons en terre crue, connues localement sous le nom de Kutcha, occupent une place prépondérante, notamment dans les zones rurales et suburbaines.
Ces habitations, bien que traditionnelles, sont le reflet d’une adaptation ingénieuse aux ressources disponibles, mais elles posent également des défis considérables en termes de sécurité et de durabilité, surtout dans un pays sujet aux catastrophes naturelles comme les inondations et les séismes.
Caractéristiques des maisons en terre au Bangladesh
Les maisons en terre crue sont une typologie de construction qui utilise principalement la terre comme matériau de base pour les murs porteurs. Ces murs, dont l’épaisseur varie entre 45 cm et 90 cm, sont souvent associés à des toits en tuiles d’argile, en chaume, ou en tôles ondulées, en fonction de la disponibilité des matériaux locaux et des moyens financiers des habitants. Ces maisons sont généralement de plain-pied, bien que certaines puissent comporter un deuxième étage. Leur plan est souvent rectangulaire, avec une longueur de 6 à 9 mètres et une largeur de 3 à 5 mètres.
La construction de ces habitations est rudimentaire : les fondations sont peu profondes, à peine creusées à une profondeur de 30 à 50 cm, sans aucun renforcement spécifique, ce qui les rend très vulnérables aux forces latérales, comme celles générées par les séismes ou les vents violents. De plus, le lien entre les murs et la toiture est souvent inexistant ou très faible, accentuant encore cette vulnérabilité.
Kutcha : un habitat adapté à son environnement, mais particulièrement vulnérable aux aléas naturels
Ces maisons sont principalement construites dans les régions moins sujettes aux inondations, c’est-à-dire sur des terrains élevés ou montagneux. Toutefois, malgré cette précaution, elles ne sont pas à l’abri des dommages causés par les catastrophes naturelles. En effet, le Bangladesh, étant situé dans une zone sismiquement active, connaît fréquemment des tremblements de terre, et les maisons en terre, avec leur masse importante et leur résistance faible aux forces sismiques, souffrent souvent de dégâts importants lors de tels événements. Les séismes de 1997 et 2003, par exemple, ont causé l’effondrement de nombreuses maisons en terre, entraînant des pertes humaines et matérielles significatives.
L’absence de normes de construction et le manque de connaissances techniques parmi les constructeurs locaux exacerbent ces problèmes. Les murs en terre, bien qu’épais, ne sont pas renforcés, et les ouvertures pour les portes et fenêtres sont souvent mal placées, augmentant le risque d’effondrement des structures lors des secousses sismiques. De plus, les toitures ne sont pas bien ancrées aux murs, ce qui provoque souvent leur détachement et leur effondrement en cas de tremblement de terre.
Aspects socio-économiques et culturels des Kutcha
Les Kutcha sont principalement habitées par des familles à faible revenu, tant en milieu rural qu’urbain. Selon les données, environ 83 % des habitations rurales et 46 % des habitations urbaines sont des Kutcha. Pour les familles les plus pauvres, ces maisons représentent souvent la seule option de logement, en raison de leur coût relativement bas. En moyenne, la construction d’une maison en terre de 100 m² coûte entre 1 000 et 1 500 USD, ce qui reste abordable pour une grande partie de la population bangladaise.
Cependant, ces maisons, bien qu’économiques, nécessitent un entretien régulier, notamment en raison de la détérioration rapide des murs en terre sous l’effet des pluies, des inondations et du climat humide. Les toits en chaume ou en tôle ondulée doivent également être remplacés fréquemment, surtout après la saison des moussons, lorsque les fuites et les dommages sont courants. Cet entretien constant est souvent négligé par les plus pauvres, qui n’ont pas les moyens ou le temps pour effectuer les réparations.
Les défis de la modernisation et de la sécurisation des maisons en terre crue du Bangladesh
Malgré leur vulnérabilité, les maisons en terre restent un choix populaire pour de nombreuses familles bangladaises. Pour améliorer leur sécurité, des efforts sont en cours pour introduire des techniques de construction plus résistantes. Par exemple, l’intégration de poteaux en bambou dans les murs de terre peut augmenter leur résistance aux charges latérales. De plus, la couverture des murs avec des tapis de jute renforcés de lames de bambou peut aussi aider à limiter les dégâts causés par les séismes.
Cependant, ces techniques de renforcement ne sont pas encore largement adoptées, en grande partie à cause du manque de sensibilisation et de formation parmi les constructeurs locaux. Les initiatives de formation et d’éducation, ainsi que l’accès à des financements pour les améliorations des habitations, pourraient jouer un rôle dans la réduction de la vulnérabilité des Kutcha face aux aléas naturels.
De plus, les familles du Bangladesh ne sont pas les seuls habitants de ces maisons. Une myriade de chèvres, de poules, de vaches, de chiens et de pigeons partagent aussi l’espace. Cette grande variété d’occupants est facilitée par une collection aussi diversifié de chèvreries, de silos de stockage de riz, de poulaillers, de cabane à vache et de casiers à pigeon. Ces éléments sont stratégiquement placés pour définir plus précisément la limite de la propriété familiale et l’espace entre voisins.
Conclusion sur la Kutcha
Les maisons en terre crue du Bangladesh sont un témoignage vivant de la capacité d’adaptation des populations aux ressources disponibles et aux conditions environnementales.
Cependant, elles représentent également un défi majeur en termes de sécurité et de durabilité, dans un pays où les catastrophes naturelles sont fréquentes. Pour assurer un avenir plus sûr à ces habitations, il est essentiel d’encourager l’adoption de techniques de construction améliorées, de sensibiliser les communautés locales aux risques sismiques, et de soutenir les efforts de modernisation par des politiques publiques adéquates et des initiatives de micro-financement. Seul un engagement collectif permettra de préserver ce patrimoine architectural tout en protégeant les vies humaines.