Les Baka vivent dans la forêt tropicale du bassin du Congo. On les trouve au sud-est du Cameroun, au nord du Congo et du Gabon, et au sud-ouest de la République centrafricaine.
Ce sont des groupes dispersés, mais tous partagent une vie étroitement liée à la forêt. Leur quotidien tourne autour de la chasse, de la cueillette et de l’échange avec les peuples voisins.
On les a souvent appelés “pygmées”, mais ce mot est de moins en moins utilisé. Il est chargé d’histoire coloniale et ne respecte pas la diversité des peuples concernés. Les Baka sont parfois considérés comme proches des Twa, mais ce n’est pas exact. Ce sont deux groupes différents, chacun avec sa propre langue et ses propres traditions. Mais revenons-en aux huttes du peuple Baka…
Un mode de vie adapté à la forêt
Les Baka connaissent la forêt comme personne. Ils se déplacent souvent, selon la saison ou les ressources. Ils récoltent des tubercules, des feuilles, des champignons, des fruits, des noix.
Ils chassent de petits animaux, des singes, des antilopes. Ils mangent également des chenilles, une source de protéines importante. Ce qu’ils ne trouvent pas dans la forêt, ils l’échangent : sel, ustensiles, bananes, manioc. Tout est une question de partage. Rien n’est gaspillé avec ce peuple.

La hutte móngulu : une maison simple et ingénieuse
La maison traditionnelle des Baka s’appelle móngulu. Ce n’est pas une cabane comme on peut l’imaginer en Europe. C’est une structure légère, facile à construire et à démonter. C’est aussi un abri qui protège du soleil, de la pluie, et des insectes. Et surtout, elle s’adapte à la vie nomade. On ne reste jamais très longtemps au même endroit, alors il faut pouvoir partir sans tout laisser derrière soi.
La construction commence par le choix d’un bon emplacement, à l’abri du vent et sur un sol pas trop humide. Les femmes jouent le premier rôle dans la construction. Ce sont elles qui rassemblent les branches souples et choisissent les plus grandes feuilles. Le travail se fait en groupe, souvent en chantant.
On plante d’abord des bâtons en cercle pour former la base. On courbe ensuite des branches pour donner la forme d’un dôme. Il faut que ce soit solide, mais aussi souple. Si une branche casse, on recommence. Quand la structure est prête, on la recouvre de feuilles de Marantaceae.
Ce sont de grandes feuilles, épaisses, qui repoussent bien l’eau. Elles viennent d’une plante très commune dans la région. Les feuilles sont superposées pour éviter que la pluie ne passe au travers. Parfois, on ajoute également une couche de branches ou d’autres végétaux pour renforcer la hutte.


Un espace pour la famille
Le móngulu sert d’abri à une famille entière. L’espace est modeste, mais chacun trouve sa place. Il n’y a pas de meubles. On dort à même le sol, parfois sur une natte. Le feu est généralement à l’extérieur.
La hutte móngulu des Baka ne dure pas éternellement. La pluie, l’humidité et les insectes finissent par l’abîmer. Mais ce n’est pas un problème. Quand il faut partir, on en reconstruit une nouvelle ailleurs. Rien n’est perdu. Les matériaux sont tous pris dans la forêt, et ils retournent à la terre.

Un savoir transmis d’une génération à l’autre
La construction du móngulu n’est pas écrite dans un livre. C’est un savoir-faire qui se transmet par la pratique, en regardant les aînées, en aidant petit à petit. Les enfants apprennent très tôt à couper des branches, à reconnaître les bonnes feuilles, à assembler une structure solide.
Tout cela fait partie de l’éducation. Il n’y a pas de chef de chantier, pas de plan à suivre. Chacun sait ce qu’il doit faire, selon son âge ou son expérience. Ce savoir, pourtant, n’est pas figé. Parfois, des matériaux nouveaux arrivent par l’échange : une bâche plastique, une corde plus solide. Les Baka s’adaptent. Mais le principe reste le même : utiliser ce que la forêt offre, sans abîmer l’environnement.

Une hutte symbole d’identité
Le móngulu n’est pas qu’un abri. C’est aussi un signe d’appartenance. Pour les Baka, construire une hutte, c’est affirmer sa place dans le groupe, transmettre un héritage, montrer qu’on sait vivre dans la forêt.
Certains voient dans cette hutte une forme de pauvreté. En réalité, c’est tout l’inverse. Le móngulu est le résultat d’un savoir très précis, d’un rapport intime avec la nature. Il n’y a pas de gaspillage, pas de superflu. Ce n’est pas la maison qui fait le prestige, c’est la façon de l’habiter.


Les défis d’aujourd’hui
La vie des Baka change. Les frontières avancent, les routes aussi. Parfois, on les pousse à quitter la forêt pour s’installer en bord de route, dans des maisons en tôle ou en bois. Ce n’est pas toujours un choix. Les règles changent, les habitudes aussi. Mais la hutte móngulu reste un point de repère. Même si la vie moderne s’impose, beaucoup tiennent à construire leur abri traditionnel, au moins lors des fêtes ou des périodes de chasse. C’est une façon de dire : “On est encore là. On existe.”
Les Baka ne sont pas les seuls à construire des abris légers en forêt (découvrez la hutte du peuple Mbuti par exemple). Mais le móngulu garde une place à part. Il est la preuve d’un lien avec la forêt, d’un mode de vie qui s’adapte et qui continue, même face aux pressions extérieures.
À travers le móngulu, on voit tout ce que la forêt peut offrir, mais aussi tout ce qu’il y a à perdre si ces savoirs disparaissent. Les Baka ne demandent pas grand-chose. Juste la possibilité de vivre selon leurs choix, dans le respect de leur histoire et de leur forêt. Et c’est là que réside la force de cette hutte.