Un torogan, qui se traduit par « un endroit pour dormir », est la maison seigneuriale des membres d’élite de la tribu Maranao dans la province de Lanao del Sur dans l’île de Mindanao, aux Philippines. Un torogan n’est pas une maison ordinaire parce que c’était un symbole de statut social élevé. Une telle résidence était autrefois une maison d’un sultan ou Datu dans la communauté Maranao. De nos jours, on trouve des maisons en béton partout dans les communautés, mais il reste des torogans centenaires. Les plus connus sont les torogans de Dayawan, de la ville de Marawi et d’autres situés autour du lac Lanao.
Un torogan est élevé au-dessus du sol par ses colonnes coupées d’arbres de grande circonférence. Ses murs sont couverts de bâtons et le toit recouvert de feuilles de cocotier séchées. Il n’y a pas de cloison intérieure, donc il apparaît comme un immense hall. Outre les éléments de base de cette structure, elle est minutieusement gravée avec les géométries du système de conception de Maranao appelé okir. Un torogan ne sera jamais complet sans l’oiseau légendaire, Sarimanok, exposé à l’intérieur.
Le Torogan Kawayan construit par le sultan sa Kawayan Makaantal à Marantao, dans la province de Lanao del Sur, est le dernier torogan habitable. Il a été déclaré trésor culturel national en 2008.
Origines et contexte historique
Le torogan est plus qu’une maison ; il incarne le statut social et la richesse du datu, le chef du village ou de la communauté. Ces structures étaient érigées pour les familles nobles, reflétant leur pouvoir, leur influence et leur rôle central dans la gouvernance locale. À travers les siècles, le torogan est devenu un symbole emblématique dans la culture Maranao, représentant l’identité et la fierté de ce peuple.
La construction d’un torogan était un événement majeur qui mobilisait toute la communauté. Les villageois contribuaient par leur travail, leurs compétences et leurs ressources, renforçant ainsi les liens sociaux et le sens de l’appartenance collective. Le torogan servait également de siège du gouvernement local, où se prenaient des décisions importantes affectant la vie du village.
Caractéristiques architecturales
Ce bâtiment traditionnel se distingue par son toit imposant et ses décorations élaborées. La structure repose sur de solides piliers en bois, souvent fabriqués à partir de troncs d’arbres durs comme le narra ou le molave, capables de résister aux tremblements de terre. Les murs sont généralement en planches de bois soigneusement assemblées, et le toit est recouvert de feuilles de palmier ou d’herbe cogon.
Le torogan est construit sur pilotis, élevant la maison au-dessus du sol. Cette conception permet de se protéger des inondations, des animaux sauvages et d’assurer une ventilation naturelle. L’espace sous la maison est souvent utilisé pour les animaux domestiques ou le stockage de provisions.
Le panolong : élément décoratif emblématique
Le panolong est une projection en bois sculpté qui orne les extrémités du toit. Ces éléments sont riches en symbolisme. Les sculptures représentent souvent le naga, un serpent mythique symbolisant la richesse et la prospérité, ou le sarimanok, un oiseau légendaire considéré comme un messager divin.
Les motifs du panolong reflètent les croyances, les légendes et l’esthétique du peuple maranao. Les artisans sont réputés pour leur habileté dans l’okir, un style de décoration caractérisé par des motifs floraux et géométriques complexes. Ces ornements ajoutent une dimension artistique au torogan.
Symbolisme et fonctions du torogan
Au-delà de son aspect résidentiel, le torogan sert de lieu de rassemblement pour la communauté. Il accueille des cérémonies, des mariages, des fêtes et des réunions importantes. Le torogan est le centre de la vie sociale et politique du village, renforçant la cohésion communautaire.
Les décorations et les sculptures du torogan racontent des histoires, transmettant les traditions, les valeurs et les croyances aux générations futures. Chaque élément architectural porte une signification particulière, contribuant à l’éducation culturelle des jeunes membres de la communauté.
Techniques de construction traditionnelles
La construction du torogan nécessite une expertise transmise de génération en génération. Les artisans utilisent des outils manuels et des méthodes ancestrales. Les jointures en bois sont conçues sans clous ni vis, grâce à des techniques d’assemblage ingénieuses qui assurent une solidité remarquable.
Le bois doit être de qualité supérieure pour garantir la durabilité de la structure. Les artisans sélectionnent soigneusement les arbres, respectant les rites et les traditions liés à l’abattage, afin de préserver l’équilibre avec la nature. Cette approche reflète le respect des Maranao pour l’environnement.