Les maisons traditionnelles en Syrie

La Syrie, riche de son histoire millénaire, offre une diversité architecturale, façonnée par des siècles d’adaptation aux conditions climatiques, aux ressources locales et aux modes de vie. En tant que passionné en architecture, je vous propose un tour d’horizon des principaux types de maisons traditionnelles syriennes, chacune témoignant d’un savoir-faire unique et d’une bonne ingéniosité.

Les tentes bédouines

Dans les régions désertiques du sud et de l’est de la Syrie, notamment autour de Palmyre, Deir ez-Zor ou dans le désert syrien (Badiyat al-Sham), les Bédouins ont longtemps vécu sous des tentes appelées beit al-sha’ar, littéralement maison de poil. Ces structures, montées avec des poteaux en bois et recouvertes de tissu tissé à partir de laine de chèvre ou de poil de dromadaire, sont pensées pour une vie nomade.

Le choix des matériaux n’est pas anodin. La laine utilisée pour le tissage est naturellement imperméable et isolante. Elle protège du soleil écrasant en journée, tout en conservant la chaleur la nuit. Les fibres sombres absorbent également l’humidité et la rejettent rapidement, évitant la condensation à l’intérieur.

La tente bédouine est modulable : sa taille varie selon la richesse du clan et le nombre de membres de la famille. Elle est souvent divisée en deux espaces : un pour les hommes et les invités (majlis), l’autre pour les femmes et les enfants. Cette séparation reflète l’organisation sociale et leurs codes d’hospitalité.

Facile à démonter, transporter et remonter, la tente accompagne les déplacements saisonniers des tribus, à la recherche de pâturages pour les troupeaux. Cet habitat léger, peu visible dans le paysage, s’inscrit dans une logique d’autonomie, de mobilité et de respect de l’environnement. Aujourd’hui, bien que sédentarisées pour beaucoup, certaines familles bédouines continuent d’utiliser ces tentes lors de fêtes, de mariages ou de déplacements temporaires. Leur fabrication artisanale perdure, et certaines sont même réinterprétées dans des projets touristiques ou culturels pour valoriser l’héritage nomade.

tente bédouine

Les maisons avec cour

Présentes notamment à Damas et Alep, ces demeures s’organisent autour d’une cour centrale, élément structurant de l’habitat. Cette cour, souvent agrémentée d’une fontaine et de végétation, permet de réguler naturellement la température, offrant fraîcheur en été et chaleur en hiver.

Les pièces s’articulent autour de cet espace, garantissant intimité et convivialité. Les matériaux utilisés, tels que la pierre et le bois, assurent une isolation thermique efficace. Les décors intérieurs, avec leurs plafonds en bois sculpté et leurs mosaïques, reflètent le raffinement de l’artisanat syrien. Je vous invite à lire mon article sur la maison traditionnelle syrienne avec cour pour en savoir plus à son sujet.

Les maisons à coupole

Dans le nord de la Syrie, notamment dans la région de la Békaa, on trouve des maisons à coupole, construites en briques de terre crue mélangée à de la paille. Cette technique, vieille de plusieurs millénaires, offre une excellente isolation thermique et une grande durabilité.

Les coupoles, en plus de leur esthétique singulière, permettent une répartition uniforme des charges, rendant ces structures résistantes aux séismes. Hélas, ces habitations sont aujourd’hui menacées de disparition, en raison de l’exode rural et de l’abandon des techniques traditionnelles.

maison à coupole dans le nord de la Syrie

Les maisons en pisé

Dans plusieurs régions rurales de Syrie, notamment dans le centre et l’est du pays, le pisé est un mode de construction traditionnel encore bien ancré. Cette technique millénaire consiste à compacter de la terre argileuse, parfois mêlée à de la paille ou du gravier, entre deux coffrages en bois. Une fois séchée, cette terre forme des murs massifs, solides et très isolants. Ce choix n’est pas esthétique ou folklorique. Il répond à une logique de bon sens : le matériau est disponible sur place et nécessite très peu de transformation. Le bilan carbone est donc très faible, et l’entretien, s’il est régulier, garantit une grande longévité à l’ouvrage. Dans des régions semi-arides, la terre crue s’impose par sa capacité à stabiliser la température intérieure. Elle garde la fraîcheur en journée, et libère la chaleur emmagasinée la nuit.

Les murs en pisé peuvent atteindre une épaisseur de 50 cm à 80 cm. Cette masse thermique élevée offre une très bonne inertie. La maison respire naturellement, sans condensation ni surchauffe. Contrairement aux idées reçues, ce type de construction résiste bien aux aléas climatiques, à condition d’être protégé des fortes pluies par des débords de toiture, des enduits adaptés et parfois un soubassement en pierre.

Certaines maisons traditionnelles en pisé en Syrie présentent un agencement particulièrement réfléchi : pièces orientées selon le soleil, ouvertures limitées et haut placées pour éviter les courants d’air chauds, et toitures plates permettant de récupérer l’eau de pluie. Le toit devient aussi un espace de vie en été.

Les maisons en pierre sèche

Dans les régions montagneuses du nord-ouest de la Syrie, notamment autour de Maarrat al-Nouman, Idlib et les villages comme Serjilla ou al-Bara, les maisons en pierre sèche témoignent d’un savoir-faire ancien et pragmatique. Ces constructions, édifiées sans mortier, reposent sur un empilement de blocs.

La technique permet d’obtenir des murs stables, durables et parfaitement adaptés aux séismes fréquents dans cette zone. Les habitations sont souvent à un ou deux niveaux, avec des voûtes ou des arcs pour répartir les charges. Cette architecture sobre s’intègre dans le paysage et utilise les ressources locales.

Les maisons en pierre sèche montrent aussi une vraie intelligence climatique : leur masse offre une inertie thermique appréciable, et leur orientation tient compte des vents et de l’ensoleillement. Aujourd’hui, certains de ces villages abandonnés livrent de précieuses leçons de résilience.

maison syrienne en pierre sèche

Conclusion sur les maisons traditionnelles syriennes

Les maisons traditionnelles syriennes, qu’elles soient à cour intérieure, à coupole, troglodytes, en pisé ou en pierre sèche, illustrent une richesse architecturale exceptionnelle. Elles sont le fruit d’une adaptation intelligente aux conditions climatiques, aux ressources disponibles et aux modes de vie locaux.

Aujourd’hui, face aux défis de la modernisation et de l’urbanisation, il est crucial de préserver et de valoriser ce patrimoine unique. Ces habitations offrent des solutions durables et écologiques, inspirant les constructions contemporaines soucieuses de l’environnement et du bien-être des habitants.

En tant que professionnel de l’immobilier et de l’architecture, je vous encourage à redécouvrir ces trésors architecturaux et à envisager leur intégration dans des projets modernes, alliant tradition et innovation.

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