Les anciens ksour (villages fortifiés) de Mauritanie (Ouadane, Chinguetti, Tichitt et Oualata) ont été fondés au 11ème et 12ème siècles pour répondre aux besoins des caravanes traversant le Sahara. Ouadane, à l’extrémité nord-ouest de l’itinéraire est à environ 1 000 km de Oualata à l’autre extrémité.
Chaque village est centré autour d’une mosquée avec un minaret carré, et les maisons s’agglutinent le long des rues étroites, l’ensemble entier est entouré par une sorte de fortification murée. Les matériaux utilisés pour la construction de chaque village reflètent la disponibilité locale, avec Ouadane et Chinguetti construit principalement en pierre, tandis que Oualata est fait en grande partie de terre.
Les villages étaient tous établis dans des vallées fertiles ou des oasis, et jouaient un rôle clé dans l’éducation religieuse, devenant des centres importants de la culture islamique.
Aujourd’hui, avec la disparition des itinéraires commerciaux, ils ont perdu une grande partie de leur importance et sont dépeuplés car les rues sont englouties par le sable et les habitants sont partis chercher une meilleure vie ailleurs. Ces villages fournissent néanmoins des aperçus sur la prospérité et la culture qui se sont développées il y a des siècles autour des routes commerciales transsahariennes.
Ouadane : la citadelle de la pierre
Ouadane est sans doute le plus austère des anciens ksour de Mauritanie. Perchée sur une crête rocheuse, la vieille ville se distingue par l’emploi quasi exclusif de la pierre sèche. Les murs épais, construits sans mortier ou avec un liant local à base d’argile, donnent aux maisons une allure massive.
Les ruelles étroites serpentent entre les habitations, souvent à plusieurs niveaux, reliées par des escaliers de pierre brute. La mosquée, au centre du village, affiche un minaret carré et sobre.
Les toits plats, soutenus par des troncs de palmiers ou de maure, servent de terrasse et de point de vue sur le désert. Autour du noyau central, on retrouve les vestiges de murailles protégeant le site contre les incursions. Ouadane reflète l’adaptation à un environnement minéral extrême.

Chinguetti : la cité des bibliothèques
Chinguetti, souvent qualifiée de « septième ville sainte de l’islam », s’est construite autour de son imposante mosquée à minaret carré, un des emblèmes architecturaux de la Mauritanie.
Les maisons sont bâties en pierre schisteuse locale, parfois mêlée de terre pour lier les blocs. Les façades austères ne laissent guère de place à la décoration, mais l’organisation intérieure est pensée pour la fraîcheur : patios, cours intérieures et petites ouvertures limitent la chaleur.
Chinguetti est célèbre pour ses anciennes bibliothèques familiales, qui conservent des manuscrits précieux. Ces bâtisses comportent souvent une pièce spéciale, voûtée, destinée à la conservation des livres. Les ruelles rectilignes, parfois couvertes d’arcades, témoignent d’un urbanisme sobre, fait pour la vie collective et la prière, au cœur d’une oasis aujourd’hui engloutie en partie par le sable.


Tichitt : l’architecture en damier et l’influence saharienne
Tichitt possède une organisation urbaine unique en damier, rare dans la région. Les maisons sont construites en pierre, mais la maçonnerie y est plus fine, avec des blocs taillés et ajustés.
Certains murs révèlent une alternance de pierres claires et sombres. Les toits plats sont renforcés de poutres en palmier, et les portes basses s’ouvrent sur des pièces fraîches, à l’abri de la chaleur.
Les rues de Tichitt sont larges par rapport à celles des autres ksour, favorisant la circulation de l’air. Les habitations, souvent dotées de petites cours internes, montrent une attention portée à la vie familiale et communautaire. La mosquée, toujours au centre, s’intègre au tissu urbain, sans dominer l’ensemble.

Oualata : la perle ocre du désert
À l’extrême est, Oualata tranche par son architecture en banco (terre crue) et ses décors peints. Les maisons traditionnelles de Oualata sont bâties avec des briques d’adobe recouvertes d’un enduit ocre, dont la teinte chaude s’accorde à la couleur du sable environnant. Ce qui fait la renommée de l’architecture d’Oualata, ce sont les motifs géométriques et floraux peints à la chaux sur les façades, réalisés par les femmes du village. Ces fresques colorées sont uniques en Mauritanie.
Les maisons comportent souvent des pièces voûtées, qui gardent la fraîcheur malgré la chaleur extrême. Les ruelles sont sinueuses, parfois couvertes, et les murs massifs protègent l’intérieur des habitations du vent et du sable. Au centre, la mosquée partage la même palette ocre que les habitations voisines, s’inscrivant dans une harmonie parfaite avec le reste du village.



Aujourd’hui, ces quatre ksour inscrits au patrimoine mondial de l’UNESCO témoignent d’une histoire millénaire, d’un savoir-faire architectural unique et d’une adaptation remarquable à l’environnement saharien. Malgré la pression du désert et la désertification humaine, les maisons de Ouadane, Chinguetti, Tichitt et Oualata sont des trésors pour quiconque s’intéresse à l’architecture vernaculaire du Sahara.