La villa que nous examinons ici, nommée Aljawda Villa, se trouve dans le quartier de Bagdad Al Mansour. C’était autrefois une maison de diplomates et de professionnels qui étaient assez riches pour embaucher des gardes. Elle offre un aperçu de la juxtaposition entre modernité et tradition dans le paysage architectural irakien. À première vue, cette demeure impose par son style monumental et ses choix de conception qui contrastent fortement avec l’architecture traditionnelle irakienne. Analysons cette construction, tout en comparant ses caractéristiques avec les styles traditionnels du pays.
Une façade majestueuse et imposante
La façade de la villa, dominée par des colonnes imposantes et des arches en verre noirci, se distingue immédiatement par son apparence austère et robuste. L’utilisation de la pierre beige claire, un choix de matériau fréquent dans l’architecture moyen-orientale moderne, confère à la structure un caractère à la fois solide et élégant. Cependant, ce matériau contraste avec la brique et le plâtre que l’on trouve couramment dans les habitations traditionnelles de Bagdad telles que le Hosh.
Les fenêtres, protégées par des barreaux métalliques, ajoutent une note sécuritaire, évoquant peut-être les préoccupations contemporaines de sécurité dans une ville qui a traversé des périodes d’instabilité. Ce choix architectural diffère des moucharabiehs délicats et des fenêtres aux ouvertures fines que l’on observe dans les maisons traditionnelles, où l’intimité et la ventilation étaient des priorités.
Espaces extérieurs : entre luxe et simplicité
L’espace extérieur présente un mélange de luxe et de simplicité. Le terrain, pavé avec des motifs géométriques, est fonctionnel et esthétiquement plaisant. On note la présence d’un terrain de basket, ce qui suggère une orientation vers un mode de vie moderne et actif. À proximité, une piscine rectangulaire en pierre renforce l’idée de confort et de détente. La simplicité des formes géométriques et l’absence de végétation luxuriante autour de la piscine dénotent une approche plus contemporaine et minimaliste, à l’opposé des jardins traditionnels irakiens souvent ornés de palmiers et de végétation dense.
Dans l’architecture traditionnelle, l’extérieur d’une maison est souvent un espace de vie, entouré de murs pour créer un havre de paix privé. La cour centrale, typique des anciennes maisons de Bagdad, est un espace intérieur protégé, en contraste avec cette villa où l’ouverture sur l’extérieur est une priorité.
Intérieur : fonctionnalité et modernité
L’intérieur de la villa, bien que fonctionnel, reste sobre dans ses aménagements. Le salon, avec ses canapés en cuir disposés autour d’une grande télévision à écran plat, reflète un mode de vie axé sur le confort moderne et les loisirs. Les sols en marbre soulignent le désir d’élégance et de luxe.
La cuisine, vaste et carrelée, avec des appareils modernes, montre une approche pratique et efficace de la vie domestique. Ici encore, l’absence d’ornements et de détails décoratifs se démarque de l’intérieur traditionnel irakien, souvent riche en tapisseries, en textiles colorés, et en objets artisanaux.
La chambre principale, bien que spacieuse, conserve une décoration minimaliste avec des meubles simples et fonctionnels. Ce choix reflète un style de vie qui valorise la simplicité et le confort moderne, en décalage avec les chambres traditionnelles décorées de motifs complexes et de couleurs vibrantes.
Un style architectural en rupture
L’architecture de cette villa de Bagdad se veut résolument moderne, cherchant à s’éloigner des normes traditionnelles pour s’aligner sur les tendances mondiales en matière de construction résidentielle. Ce choix est particulièrement intéressant dans le contexte irakien, où l’architecture a souvent été un reflet direct des changements sociaux, politiques, et économiques.
L’architecture traditionnelle de Bagdad, avec ses cours intérieures, ses moucharabiehs, et ses matériaux locaux, témoigne d’une adaptation aux conditions climatiques locales, tout en offrant une protection contre les regards indiscrets et les conditions météos. En comparaison, cette villa semble plus inspirée par les tendances internationales que par le besoin de s’intégrer dans le tissu architectural local.
Une maison symbolique d’une époque de transition
Cette villa à Bagdad est un symbole de la transition que traverse la société irakienne, où les influences occidentales s’entrelacent avec les racines culturelles profondes du pays.
Le choix d’une architecture moderne, minimaliste et fonctionnelle, marque une rupture avec les traditions locales tout en reflétant les aspirations d’une nouvelle génération d’Irakiens à la recherche de confort et de sécurité dans un environnement en constante évolution.