Les Noubas sont un ensemble de peuples vivant dans les monts Nouba, au sud du Kordofan au Soudan. Ce terme collectif désigne une mosaïque de communautés distinctes, parlant des langues variées et possédant chacune des traditions propres. En 2003, le gouvernement soudanais estimait leur population à un peu plus d’un million d’habitants. Leur habitat, enraciné dans leur mode de vie agropastoral, reflète à la fois leur rapport à la terre, leur organisation sociale et leur environnement montagneux.
Voir aussi : la hutte du peuple Toposa et la hutte du peuple Kachipo.
Organisation des villages
Les villages nouba s’implantent généralement sur les contreforts rocheux des montagnes. Cette implantation permet de profiter de terres fertiles en contrebas pour les cultures et de bénéficier d’une protection naturelle contre les envahisseurs ou les animaux sauvages. Chaque village est constitué de plusieurs groupes familiaux. Un groupe regroupe des cases, des enclos et des greniers appartenant à une même famille élargie. Les chemins serpentent entre les huttes circulaires coiffées de toits en paille de sorgho, dessinant le paysage au cœur de la savane et des formations rocheuses.

Le shal : cœur domestique de la famille
Au centre de chaque groupe familial se trouve le shal, espace rectangulaire fermé par une palissade de bois et de paille. Deux huttes rondes en terre battue et en branchages s’y font face, coiffées de toits coniques de tiges de sorgho. On y reconnaît l’organisation symétrique qui structure la vie familiale.
À l’intérieur, deux bancs longent les parois et un foyer occupe la partie centrale. Le soir, la famille se réunit autour du feu pour partager les repas, conter les traditions orales et transmettre les récits de l’histoire collective. Le shal est donc également le foyer symbolique et culturel de la famille.

Le tog : la cour ouverte
À l’avant du shal s’étend le tog, une cour plus vaste entourée d’une clôture de branchages aussi haute que les toits. C’est un espace polyvalent où se déroulent les activités quotidiennes :
- l’élevage des petits animaux (chèvres, poulets, ânes),
- les travaux agricoles (tri du sorgho, séchage des récoltes),
- mais aussi la vie sociale avec les enfants qui jouent ou les femmes qui échangent.
Cette cour sert de transition entre l’espace intime du shal et la vie du village.

Les greniers coniques : conserver la récolte
Indispensables à l’économie agraire du peuple Nouba, les greniers coniques, appelés durs, se dressent sur pilotis ou sur des bases de pierre à l’intérieur des enclos. Leur forme conique et leur toiture en chaume assurent une excellente conservation du sorgho, des arachides et du maïs.
L’entrée de ces greniers est volontairement petite, à hauteur d’homme, ce qui oblige à grimper par une échelle et à plonger à l’intérieur pour prélever le grain. Cette architecture ingénieuse empêche l’humidité et limite les infestations. Elle témoigne d’un savoir-faire ancien adapté au climat local.

Variantes de l’habitat
Si les familles nombreuses possèdent un véritable complexe organisé autour du shal et du tog, les petites familles se contentent souvent d’une seule hutte circulaire en terre, entourée d’une clôture légère. L’intérieur est très sobre : un cadre de lit en bambou couvert d’un tapis en corde de baobab, un foyer central, et quelques outils accrochés aux murs. Un mode de vie centré sur l’essentiel.
Derrière la hutte, un petit jardin vivrier est cultivé, avec haricots, citrouilles et légumes de saison. Plus loin, sur les pentes des collines, s’étendent les champs de sorgho et d’arachides.

Bétail, alimentation et traditions culinaires
La richesse d’un Nouba se mesure souvent à son cheptel. Les vaches sont gardées dans des enclos appelés coh, tandis que les veaux disposent de leur espace spécifique, le cohnih. Ces enclos, construits en bois et en branchages, témoignent de l’importance centrale de l’élevage dans la société nouba.
L’aliment de base des Noubas est le sorgho, consommé sous différentes formes : bouilli avec de l’eau ou du lait, ou transformé en une pâte accompagnée de sauce. L’un des plats typiques est le waj, un ragoût de viande épaissi au sorgho. Il est au cœur de leur identité culinaire et de leurs traditions quotidiennes.
Le maïs est également grillé et mangé avec du beurre artisanal. Ces préparations simples mais nourrissantes s’accordent avec le rythme de vie agricole et pastoral de la communauté.


Une architecture adaptée au milieu
Les huttes du peuple Nouba sont une illustration de l’architecture vernaculaire africaine.
Les matériaux sont exclusivement locaux :
- terre battue pour les murs,
- bois et branchages pour les structures,
- chaume de sorgho pour les toits.
Cette architecture assure une fraîcheur intérieure malgré la chaleur extérieure et une résistance aux vents et aux pluies saisonnières. Insérées dans un paysage de rochers monumentaux, elles forment un patrimoine aussi fonctionnel qu’esthétique. Elles illustrent l’équilibre entre habitat et nature.