Nałęczów attire pour son parc thermal et ses promenades tranquilles. Pourtant, ce qui frappe souvent en premier, ce sont les villas en bois qui bordent les allées. Elles donnent à la ville une ambiance particulière, entre station de cure et villégiature. Construites entre la fin du XIXᵉ siècle et le début du XXᵉ, elles mêlent influences venues de Zakopane, motifs alpins et touches de secession. Ce mélange forme un quartier où chaque maison montre un choix, une saison passée ici, une manière de chercher le calme.
Nałęczów, une petite ville d’eaux entourée de villas
Nałęczów se trouve à l’est de la Pologne, entre Lublin et Kazimierz Dolny. Vous y arrivez souvent pour l’eau minérale, pour une cure ou pour un week-end calme. Mais dès l’entrée dans la ville, quelque chose attire le regard autant que le parc thermal : les villas en bois, posées parmi les arbres, parfois cachées.
Au XIXᵉ siècle, Nałęczów devient un centre de soins réputé. La mise en place du centre thermal à partir de 1878, sous l’impulsion du médecin Fortunat Nowicki, transforme un domaine aristocratique en station de santé ouverte au public. Autour du parc, les propriétaires lotissent les terrains, tracent des allées et font construire des maisons de villégiature. Les villas en bois s’installent progressivement autour du cœur classique, dominé par le palais Małachowski. Aujourd’hui, lorsque vous marchez le long de l’avenue Lipowa ou dans le parc Zdrojowy, vous traversez un paysage façonné par cette période. Des arbres anciens bordent les allées, avec, derrière eux, des façades en bois peint, des balcons, des vérandas.
Comment les villas en bois sont apparues ?
D’abord, le noyau aristocratique : le palais, le parc thermal et les premiers bâtiments de soins. Ensuite, une société crée et gère l’établissement thermal, ce qui amène des investissements privés. Les terrains proches du parc sont divisés en parcelles pour des résidences. On voit alors apparaître un quartier presque entièrement tourné vers l’hébergement : pensions, maisons d’hôtes, villas familiales.
Une étude récente sur l’architecture de Nałęczów souligne que ces villas, qu’elles soient en bois ou en brique, ne jouent pas un rôle secondaire. Elles entourent le parc comme une couronne et donnent aussitôt le ton. Sans elles, la station ressemblerait à n’importe quel centre de soins. Avec elles, vous entrez dans une petite ville-jardin, un lieu où l’on cherche autant l’ambiance que les traitements.
Le rythme des cures façonne aussi ces maisons. Comme les séjours durent plusieurs semaines, les familles cherchent des chambres, mais aussi des salons où se retrouver, des terrasses pour s’asseoir au calme, des jardins pour marcher et flâner. La villa en bois répond bien à cette demande. Ce n’est ni un grand hôtel, ni une petite cabane, mais une maison où l’on revient facilement d’une saison à l’autre.
Un air de Suisse au cœur du Lublin
Quand vous levez les yeux sur certaines villas de Nałęczów, vous retrouvez des éléments venus des stations alpines. Des recherches sur le « style suisse » dans la ville montrent des toits à forte saillie, des pignons largement débordants, des galeries en bois finement découpées.
Ces motifs, arrivés en Pologne par la mode des villégiatures de montagne, ont été adaptés au climat local et à la forêt de pins environnante. Une villa comme Nagórze, construite vers 1882 pour la famille Nagórski, illustre bien ce goût. Le bâtiment est en bois, avec une silhouette très lisible, un toit accentué et une façade animée par des balcons et des garde-corps ajourés. Ce n’est pas une copie de chalet suisse, mais une interprétation polonaise, liée au langage des stations thermales de l’époque.
Une publication consacrée à la colline Poniatowski, intégrée aujourd’hui à l’ensemble paysager de Nałęczów, mentionne d’ailleurs un groupe de villas de style suisse, italien et zakopanais. Cette diversité donne au quartier une allure de catalogue, où les architectes testent différentes manières de marier bois, balcon et toiture complexe. Elle révèle également l’esprit d’expérimentation du lieu.
Des influences venues de Zakopane
Quand vous regardez certaines villas en bois de Nałęczów, vous pouvez penser à Zakopane. Ce n’est pas un hasard. Au début du XXᵉ siècle, l’écrivain Stefan Żeromski séjourne ici et invite l’architecte Jan Koszczyc-Witkiewicz à concevoir un bâtiment dans l’esprit des maisons du Podhale. C’est ainsi que naît la Chata Żeromskiego, une maison en rondins aujourd’hui transformée en musée. Ses façades sculptées, ses pignons travaillés et son toit en bardeaux rappellent directement le style architectural Zakopane.
Après cette construction, plusieurs propriétaires s’intéressent également à ce style. Ils en reprennent des éléments : pannes apparentes, garde-corps sculptés, motifs floraux inspirés de l’art montagnard. Mais les architectes ne cherchent pas à copier l’architecture Zakopane trait pour trait. Ils ajustent les formes au parc thermal, au relief doux et aux usages liés aux cures. Les villas de Nałęczów sont plus régulières, souvent plus symétriques, et s’ouvrent largement sur les jardins ou les galeries vitrées.
Vous verrez donc des maisons qui empruntent au Podhale, mais toujours en dialogue avec deux autres influences fortes : le chalet “suisse” des stations alpines et la secession qui marque les façades plus lisses et les ouvertures élargies. Cette diversité fait la singularité du quartier. Le modèle des Tatras sert de référence, mais il se mélange, se transforme et s’adapte à la vie de cette petite ville d’eaux.
Galeries, vérandas et vie au grand air
À Nałęczów, le bois ne sert pas qu’à construire des murs. Il dessine aussi des espaces intermédiaires. Les villas ont souvent un plan avec un corps principal et un ou deux pavillons annexes, reliés par des galeries couvertes ou des vérandas. Une étude sur les villas historiques du spa rappelle que ces volumes sont typiques des maisons de villégiature, qui combinent chambres, lieux de repos et terrasses abritées.
Pour les personnes qui viennent en cure à Nałęczów, ces espaces comptent autant que les soins journaliers. On y boit un thé en milieu d’après-midi, on y lit quelques pages, on y parle tranquillement à l’abri du soleil. Le bois découpé (balustres ajourés, consoles sculptées, frises sous toiture) a alors deux fonctions. Il protège la maison et apporte cette sorte de finesse qui adoucit la façade.
Les fenêtres à petits carreaux, en général réparties par un réseau de meneaux, complètent ce tableau. Une analyse des villas de style suisse en Pologne, qui cite aussi Nałęczów, souligne la récurrence de ces châssis finement divisés, où le bois reste très présent dans le dessin de la façade.
Des maisons pensées pour les curistes
Les plans intérieurs répondent à un programme : accueillir des personnes fatiguées, malades ou en convalescence, parfois plusieurs saisons de suite. Les villas proposent donc des chambres nombreuses, mais aussi des salons, des vérandas fermées vitrées, des circulations confortables.
Les rez-de-chaussée sont dédiés aux pièces de jour : salon, cuisine, salle à manger, parfois salle de musique. Les étages regroupent les chambres, accessibles par un escalier central. Les combles, éclairés par des lucarnes ou de petites fenêtres, peuvent recevoir les chambres du personnel.
Une partie des anciennes villas a trouvé une nouvelle fonction. Certaines accueillent des pensions de famille ou de petites maisons d’hôtes. La villa Oktawia, par exemple, en bois et posée derrière une rangée d’arbres, illustre bien cette évolution. Elle conserve ses balcons ajourés, ses pignons accentués et son plan compact typique de la villégiature. À l’intérieur, les aménagements ont été revus, mais la maison garde son caractère : des pièces lumineuses, des circulations simples et une relation directe avec le jardin.
Quelques villas emblématiques
Certaines villas en bois jouent un rôle particulier dans la perception de Nałęczów. La villa Willa Borowianka, construite en bois en 1900 selon un style évoquant l’ambiance “station de villégiature”, fait partie des villas historiques qui donnent son rythme au quartier. Elle marque l’entrée d’un enchaînement construit, proche du parc. On la repère facilement par ses toits, ses galeries et son allure caractéristique.
Une autre maison intéressante est la Villa Podgórze. Nichée parmi les arbres, elle illustre l’esprit des villégiatures thermales de l’époque. Ses proportions, son architecture en bois, son lien avec le paysage environnant témoignent de l’intention de créer une station où le séjour entend offrir un cadre de vie.
Il faut également citer la maison liée à l’écrivain Stefan Żeromski. L’auteur séjourne à Nałęczów, dans une villa conçue par l’architecte Jan Koszczyc-Witkiewicz, aujourd’hui transformée en musée littéraire. Le bâtiment participe à la diffusion du style Zakopane hors des Tatras, avec un usage abondant du bois, des motifs sculptés inspirés de l’art des montagnards et une structure très expressive.
Ces exemples montrent comment la station attire des curistes, mais aussi des écrivains, des artistes, des propriétaires de terrains, des architectes venus tester des formes nouvelles.
Comment regarder ces villas lors d’une visite ?
Si vous venez visiter Nałęczów, vous pouvez aborder les villas en bois comme un parcours à part entière lors de votre passage, en marge de la cure ou de la promenade dans le parc.
Une première approche consiste à suivre l’avenue Lipowa et les abords du parc Zdrojowy. Vous verrez des façades en retrait, derrière des clôtures en bois ou en métal, accompagnées de jardins très végétalisés. Prenez le temps d’observer la façon dont les villas se placent sur la parcelle : certaines sont presque à l’alignement, d’autres sont tournées vers le parc, avec une terrasse ou un perron orientés jardin.
Ensuite, regardez les détails :
- les garde-corps ajourés des balcons
- les consoles sous les débords de toiture
- les menuiseries de fenêtres, parfois anciennes, avec de fins profilés
- les transitions entre bois et maçonnerie au niveau du soubassement
Vous verrez vite que chaque villa possède une signature : une couleur de peinture, une manière de traiter les angles, une forme de lucarne. Une recherche sur les villas en bois de Nałęczów signale d’ailleurs que cette individualisation des maisons est l’un des traits marquants du quartier, même après rénovation.
Au passage, soyez discret. Une grande partie de ces habitations en bois est occupée à l’année. Les habitants y vivent, reçoivent, travaillent. Se placer à distance des fenêtres, éviter les photos trop intrusives, saluer d’un signe de tête suffit généralement à garder une ambiance respectueuse.
Ce que la ville révèle des stations thermales polonaises
Les villas en bois de Nałęczów ne sont pas uniquement un ensemble pittoresque près d’un parc. Elles parlent d’un moment précis de l’histoire polonaise : l’essor des voyages de santé au XIXᵉ siècle, la diffusion de styles touristiques comme le « suisse » ou le « Zakopane », l’apparition d’une classe moyenne qui investit dans des maisons de villégiature durablement inscrites dans le paysage.
On retrouve des logiques proches à Ciechocinek, Krynica ou Otwock, avec des parcs bien dessinés, des galeries de cure et des ensembles de villas en bois à forte dimension décorative. Nałęczów se distingue par son échelle plus intime et par la place très nette donnée aux villas dans la structure de la ville. Ici, on marche presque toujours entre parc et maisons. Pour un visiteur, Nałęczów offre donc un terrain d’observation précis. Vous pouvez y suivre, en quelques rues, la façon dont un matériau (le bois) s’adapte aux attentes de la cure, aux influences étrangères et aux contraintes d’un petit centre urbain.
Vous pouvez également mesurer comment ces habitations, pensées pour des séjours de quelques semaines, cherchent aujourd’hui leur place dans une économie touristique plus rapide, avec des séjours courts, des réservations en ligne et des exigences de confort actuelles.