Ravalement de façade obligatoire tous les dix ans : mythe ou réalité ?

Vous entendez souvent qu’un ravalement de façade est « obligatoire tous les dix ans ». Vous avez peut-être reçu un courrier de la mairie. Ou un voisin vous a parlé d’une « campagne décennale ». Alors, que faut-il croire ? Voici la version claire, appuyée sur les textes en vigueur et sur les pratiques observées dans les villes qui encadrent ces travaux. Beaucoup de propriétaires découvrent cette règle au moment où la mairie les relance, sans vraiment savoir d’où elle vient ni si elle s’applique partout.

La fameuse « règle des 10 ans » : d’où vient-elle ?

L’idée d’une périodicité fixe ne sort pas de nulle part. Le Code de la construction prévoit un entretien régulier des façades, avec une possibilité d’injonction par la mairie. Depuis la recodification entrée en vigueur au plus tard le 1er juillet 2021, la règle figure à l’article L126-2 du Code de la construction et de l’habitation (CCH) : à Paris et dans les communes inscrites par décision de l’autorité administrative, les façades doivent être tenues propres et les travaux nécessaires sont faits « au moins une fois tous les dix ans » si la mairie vous le demande. Dit autrement : le « tous les 10 ans » n’est pas automatique partout ; il s’applique dans Paris et dans des communes listées par arrêté, avec un mécanisme d’injonction.

Ce que disent les textes aujourd’hui

Le CCH L126-2 fixe le principe : propreté des façades et possibilité d’exiger des travaux à échéance décennale dans Paris et les communes listées. L’article L126-3 détaille la suite : après injonction, vous avez 6 mois pour lancer le chantier, puis un délai qui ne peut pas dépasser 1 an pour le réaliser ; à défaut, le maire peut prescrire, puis faire exécuter d’office les travaux et en récupérer le coût.

Donc, mythe ou réalité ?

Un peu des deux. Réalité à Paris et dans les communes inscrites par arrêté préfectoral : la mairie peut imposer un ravalement de façade à fréquence décennale. Mythe lorsqu’on généralise à toute la France : sans arrêté, aucune périodicité fixe n’est prévue ; la règle est l’entretien et la propreté, sans « compteur » de 10 ans. La fiche officielle Service-Public le dit : « tout dépend de l’existence d’un arrêté préfectoral ». S’il existe, c’est bien « au moins 1 fois tous les 10 ans ». S’il n’existe pas, pas de fréquence imposée.

Êtes-vous concerné ?

Vous l’êtes dans deux cas. D’abord, si vous vous trouvez à Paris. Ensuite, si votre commune figure dans une liste arrêtée au niveau préfectoral, sur proposition ou avis des conseils municipaux. Service-Public cite notamment Paris, Lyon, Nantes. Le réflexe utile : vérifier sur le site de votre mairie ou appeler l’urbanisme. Cela prend dix minutes et vous évite un malentendu en assemblée générale.

Ce qui se passe quand la mairie s’en mêle

Quand une commune mène une « campagne de ravalement », elle envoie des courriers. Le courrier vaut injonction. Vous avez 6 mois pour engager les travaux (devis, commande, déclaration préalable si nécessaire), puis un délai, fixé par arrêté, qui ne peut pas excéder 1 an, pour les faire. À défaut, la mairie peut faire exécuter d’office et vous refacturer. L’amende administrative annoncée par Service-Public est de 3 750 € en plus des frais avancés par la commune. Cette mécanique protège l’espace public (sécurité, salubrité, image des rues) et pousse à traiter les pathologies avant qu’elles ne deviennent lourdes.

Et dans les communes sans arrêté ?

Vous n’avez pas de « rendez-vous décennal ». En revanche, l’obligation d’entretien existe : une façade fissurée, lézardée ou dangereuse peut faire l’objet d’une mise en demeure ponctuelle. Là aussi, la mairie peut agir si la dégradation met en cause la sécurité des passants. Votre boussole devient le bon sens : suivez l’état du support, planifiez un nettoyage, reprenez enduits et joints quand ils fatiguent, surveillez les ruissellements. L’idée n’est pas de repeindre pour repeindre, mais d’éviter l’eau dans la maçonnerie et la corrosion des éléments métalliques. Le droit laisse la main au propriétaire tant que la façade est saine.

Copropriété : comment décider et qui paie ?

En copropriété, le ravalement concerne les parties communes. Il se vote en assemblée générale. Les frais sont répartis selon les tantièmes. Si une injonction municipale tombe, le syndic doit la notifier et inscrire le sujet à l’ordre du jour. Les documents techniques récents (diagnostic technique global, projet de plan pluriannuel de travaux) aident à caler la priorité et l’échelonnement. S’il y a arrêté préfectoral avec périodicité, vous ne discutez pas le principe, mais le « comment » et les étapes du ravalement : choix technique, calendrier, financement. Dans les faits, c’est souvent l’un des postes les plus coûteux de la vie d’une copropriété, d’où l’importance d’une préparation budgétaire et technique solide en amont.

Paris, Lyon, Nantes et d’autres : comment s’y retrouver ?

À Paris, la périodicité décennale est historique. La ville rappelle noir sur blanc l’obligation de ravalement tous les 10 ans, avec les démarches à accomplir. Dans d’autres villes, le préfet peut inscrire la commune sur la liste. Certaines villes d’Île-de-France communiquent clairement sur leur « campagne » et les délais. Si vous possédez à Lyon, Nantes ou dans une commune citée par votre préfecture, adoptez le même réflexe que les Parisiens : vérifiez la prochaine échéance, anticipez les devis, réservez les entreprises.

À quoi ressemble une injonction type ?

Un syndicat parisien a reçu au printemps une injonction l’invitant à « engager sous six mois un ravalement des façades sur rue et cour ». L’AG de juin a voté le principe, lancé les études et prévu une mise en concurrence en septembre. Le chantier démarre en mars suivant, avec ITE sur pignon en béton banché et reprise de l’enduit sur cour en conservant la modénature. Tout le monde n’a pas ce tempo. Mais vous voyez l’esprit : ne pas laisser courir les six mois, verrouiller les points techniques (support, réseau d’eau pluviale), et trancher vite sur l’option isolation si vous êtes dans le cas > 50 %.

Et si vous n’êtes pas dans une commune « décennale » ?

Ne laissez pas la façade se dégrader. En pratique, beaucoup de copropriétés font un ravalement sérieux entre 15 et 25 ans selon l’exposition, la pollution et la qualité du dernier chantier. Un petit immeuble enduit en chaux côté rue abritée tiendra plus longtemps qu’un pignon béton sur un axe très passant. Visez l’entretien avant l’urgence : cela coûte moins cher qu’un ravalement sous contrainte avec pathologies lourdes. Un entretien régulier évite bien souvent un ravalement lourd et coûteux.

Check-list minute

  • Paris ou commune listée par arrêté ? Si oui, tablez sur une injonction possible « tous les 10 ans ». Sinon, pas de périodicité imposée mais obligation d’entretien.
  • Injonction reçue ? Lancez dans les 6 mois, réalisez sous 1 an maximum, sauf délai fixé autrement par la mairie. Sanction possible : exécution d’office et amende.
  • Ravalement « important » sur > 50 % d’une façade chauffée ? Vérifiez l’obligation d’isoler et les cas d’exemption (matériaux sensibles, patrimonial).
  • Copropriété : mettez le sujet à l’AG, croisez injonction, DTG/PPT et budget, phasage par façades si besoin. Cela permet d’éviter les décisions précipitées et de planifier les travaux avec cohérence.
  • Urbanisme et emprises : déposez la bonne autorisation, anticipez l’échafaudage, les riverains et les débords liés à une ITE. Une bonne préparation limite les retards et les conflits pendant le chantier.

Verdict sur le ravalement tous les dix ans

Dire « ravalement obligatoire tous les dix ans » sans contexte induit en erreur. C’est exact à Paris et dans les communes listées. C’est inexact ailleurs. Ce qui ne change pas est que vous devez veiller à la santé de votre façade. Et si vous programmez un ravalement conséquent, l’isolation peut devenir obligatoire sur les zones traitées. Mieux vaut vérifier votre statut communal, lire l’injonction avec attention si vous en recevez une, et caler un plan de travaux réaliste plutôt que de courir après les délais.

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