5Pointz était un espace d’exposition d’art en plein air à 45-46 Davis Street à Long Island, New York City, où des peintures murales colorées étaient exposées sur les murs extérieurs d’un ancien entrepôt, dessinées par des artistes du monde entier. L’espace graffiti a été organisé par Jonathan Cohen, un artiste de graffiti connu sous le surnom de « Meres », qui a transformé le lieu en « Mecque du graffitis mondial ». En effet, lorsque sa réputation comme épicentre de la scène graffiti a grandi, le complexe industriel a commencé à attirer des artistes du monde entier. Même l’artiste Banksy est passé ici.
Ce centre artistique, aujourd’hui disparu, a marqué des générations d’artistes et de visiteurs par sa créativité et ses œuvres gigantesques. Revenons sur l’histoire et l’impact de cet espace unique.
Découvrez également ce château du 13ème siècle recouvert de graffitis !
Un centre névralgique de l’art urbain
5Pointz, à l’origine un énorme entrepôt industriel, s’est transformé au fil des ans en un centre d’art de rue. Il doit son nom à l’idée de réunir les cinq arrondissements de New York en un seul point. Cependant, sa renommée a dépassé les frontières de la ville, attirant des artistes du monde entier. Les murs sont devenus des toiles à ciel ouvert, servant de support à des créations variées, allant du graffiti aux fresques.
Le site est apparu sous la direction de Jonathan Cohen, connu sous le pseudo Meres One, qui a joué un rôle central dans sa transformation. Artiste et graffeur lui-même, il a encouragé la création d’un espace où les artistes pouvaient s’exprimer librement, tout en respectant certaines règles de base. Contrairement aux graffitis réalisés illégalement, les œuvres de 5Pointz étaient créées avec l’autorisation du propriétaire du bâtiment, ce qui conférait au lieu une légitimité tout en permettant une régulation des œuvres.
Une scène ouverte pour des talents multiples
Le succès de 5Pointz tient en partie à sa capacité à accueillir des artistes issus de milieux divers. Il a réuni des graffeurs de renom, mais aussi des talents émergents, parfois moins connus. Certains artistes, venus de pays aussi lointains que la France, le Brésil ou le Japon, ont ainsi pu dessiner leurs œuvres sur ces murs. La variété des styles et des techniques donnait au lieu une richesse visuelle et artistique.
Les œuvres des murs de 5Pointz n’étaient jamais permanentes. Les artistes étaient encouragés à renouveler régulièrement leurs créations, effaçant parfois des graffs existants pour en proposer de nouveaux. Ce dynamisme perpétuel a contribué à l’attrait du lieu. Chaque visite offrait une expérience différente, où les visiteurs découvraient de nouvelles œuvres, souvent surprenantes et engagées.
La variété des thématiques abordées reflétait également la diversité des artistes et des influences. Certains graffitis étaient purement esthétiques, explorant les formes et les couleurs de manière abstraite. D’autres, en revanche, portaient des messages politiques ou sociaux, abordant des questions telles que la justice raciale, les inégalités économiques ou encore la place des minorités dans la société.
Un lieu de rencontre pour la communauté
5Pointz était un véritable lieu de rassemblement. Des artistes, des amateurs de graffiti, des touristes et des habitants du quartier s’y côtoyaient, créant un espace de dialogue et d’échange autour de l’art urbain. Ce mélange culturel a fait de 5Pointz un lieu unique dans le paysage new-yorkais.
Des événements y étaient organisés, comme des performances en direct, où les artistes peignaient devant des spectateurs. Ces moments d’interaction renforçaient le lien entre les créateurs et leur public, tout en donnant un aspect éphémère et immédiat à la création artistique. De plus, des ateliers et des rencontres y étaient organisés, permettant aux artistes de transmettre leur savoir-faire.
Le site a aussi attiré l’attention de médias internationaux et a été utilisé comme décor pour des clips, des films et des shootings photo. Sa réputation grandissante a fait de 5Pointz un point de référence dans le monde du graff, où se côtoyaient la créativité locale et les influences internationales.
Les tensions autour de la destruction de 5Pointz
Malgré son succès et sa renommée croissante, 5Pointz n’a pas échappé aux dynamiques de gentrification qui touchent de nombreux quartiers new-yorkais. En 2013, le propriétaire du bâtiment a annoncé son intention de démolir le site pour y construire des tours résidentielles. Cette décision a suscité une vive opposition de la part des artistes et des défenseurs du patrimoine culturel.
Des manifestations et des pétitions ont eu lieu pour tenter de sauver ce centre artistique unique. Mais en novembre 2013, avant même que les artistes ne puissent organiser une ultime mobilisation, le propriétaire a fait repeindre les murs en blanc, effaçant des années de créations artistiques en une nuit. Cet acte a provoqué une vague d’indignation parmi les artistes et les amateurs d’art urbain.
L’entrepôt était détenu par le promoteur immobilier Jerry Wolkoff qui l’a acheté dans les années 1970, mais il n’avait pas de plans immédiats pour le réaménagement. Après 40 ans d’abandon, il a donc décidé de développer le site en complexe de 1000 condos. Le projet de réaménagement de 400 000 000 dollars comprendra un nouveau parc public, plus de 15 000 m2 d’espace de vente au détail et un parking.
Le ressentiment et la critique qui ont suivis ont été accompagnés de manifestations. Une plainte a été déposée par les graffeurs qui affirment que leur travail était protégé en vertu de la Loi de Visual Artists Rights, mais un juge de New York a refusé d’accorder une injonction qui aurait arrêté la démolition.
Héritage et influence de 5Pointz
Bien que 5Pointz n’existe plus, son héritage perdure. Il reste gravé dans la mémoire collective comme un des hauts lieux du graffiti mondial. De nombreux artistes qui ont graffé les murs continuent de se faire un nom dans le monde de l’art urbain. Certains ont même vu leur carrière décoller grâce à leur passage.
L’impact de 5Pointz se mesure également à l’influence qu’il a exercée sur d’autres projets similaires. Partout dans le monde, des initiatives ont vu le jour pour créer des espaces où le graffiti peut s’exprimer librement et légalement. La disparition de 5Pointz, cette ancienne Mecque du graffiti, a ainsi renforcé la volonté de préserver et de promouvoir cet art, souvent méconnu ou marginalisé.
Le site de Long Island City, bien que transformé, continue d’évoquer des souvenirs pour ceux qui l’ont connu. Les visiteurs qui passent devant les nouvelles tours se souviennent des couleurs vives et des œuvres audacieuses qui ornaient autrefois ces murs. Si 5Pointz a été effacé de la carte de New York, il restera un symbole de l’âge d’or du graffiti New-Yorkais. Son souvenir résonne encore parmi les passionnés d’art urbain, rappelant la fragilité de ces lieux créatifs face aux transformations urbaines.