Blackhouses d’Écosse et d’Irlande : témoins d’un mode de vie ancestral

Les blackhouses, ces habitations traditionnelles des Highlands écossais et de certaines régions d’Irlande, témoignent d’un mode de vie rural adapté aux conditions climatiques difficiles. Construites en pierre, avec un toit de chaume et sans cheminée, elles ont marqué l’histoire de ces territoires. Ces habitations étaient des lieux de vie et de travail, abritant les familles et leurs animaux sous le même toit. Aujourd’hui, certaines blackhouses ont été restaurées et servent de musées ou de logements touristiques.

Origines et histoire des blackhouses

Le terme blackhouse (ou taigh dubh en gaélique écossais) viendrait de la distinction faite entre ces maisons et les white houses, des habitations plus modernes en pierre blanche enduite de chaux. Une autre hypothèse repose sur la ressemblance phonétique entre dubh (noir) et tughadh (chaume).

Ces maisons ont été construites dès l’époque médiévale et sont restées en usage jusqu’au début du XXe siècle. Elles étaient très répandues dans les Hébrides extérieures, les Highlands et certaines régions d’Irlande, où les conditions météorologiques exigeaient des habitations solides et bien isolées.

Avec l’amélioration des standards de vie et les nouvelles normes sanitaires imposées par le gouvernement britannique au XIXe siècle, les blackhouses ont progressivement été abandonnées au profit des white houses, qui comportaient des cheminées et des séparations claires entre les pièces.

village de Blackhouses dans les Hébrides extérieures
Village de Blackhouses dans les Hébrides extérieures

Caractéristiques architecturales

Les blackhouses ont une architecture adaptée aux environnements venteux et pluvieux de l’Atlantique Nord. Elles étaient conçues pour offrir chaleur et protection aux habitants et à leur bétail.

1. Une construction en pierre sèche

Les murs des blackhouses étaient entièrement construits en pierre sèche, sans mortier. Ils avaient une double paroi : une extérieure en grosses pierres et une intérieure en pierres plus petites, l’espace entre les deux étant rempli de terre ou d’algues séchées pour une meilleure isolation. Ce type de construction assurait une grande solidité et permettait de résister aux tempêtes fréquentes.

2. Un toit en chaume

Le toit avait une charpente en bois, souvent fabriquée à partir de bois flotté récupéré sur les côtes, car les Highlands manquaient de forêts. Ce toit était ensuite recouvert de chaume (paille ou roseaux), retenu par un filet de corde et des pierres. Cette technique empêchait le vent d’arracher la couverture.

3. Un sol en terre battue

Le sol des blackhouses était généralement en terre battue ou pavé de grosses pierres. Dans certains cas, il était légèrement incliné pour faciliter l’évacuation des eaux de pluie qui pouvaient s’infiltrer.

4. Une absence de cheminée

La fumée provenait d’un feu de tourbe qui était allumé en tout temps dans le centre de la cuisine et du salon. Aussi effrayant que cela puisse paraître, ces maisons noires n’avaient pas de cheminée et avaient de très petites fenêtres menant à une accumulation étouffante de fumée à l’intérieur. La fumée s’échappait par le toit poreux, noircissant lentement l’herbe ou la paille dans le processus.

La fumée tuait les insectes vivant dans le toit. Le chaume fumé était également considéré comme un excellent engrais. Ainsi, chaque année, le toit était enlevé et le chaume noirci était ensuite utilisé pour fertiliser les champs environnants, tandis que le toit était reconstruit pour l’année à venir.

Un mode de vie rural et communautaire

Les blackhouses servaient également d’étables. Une moitié de la maison était réservée à la famille, tandis que l’autre abritait les vaches, les moutons ou les cochons. Une cloison, parfois en pierre, séparait les deux espaces, mais la chaleur dégagée par les animaux contribuait à réchauffer l’habitation.

Les foyers étaient le cœur de ces maisons au toit de chaume. C’est autour du feu que la famille se rassemblait pour cuisiner, se réchauffer et raconter des histoires. La fumée, bien que gênante, jouait un rôle protecteur en éloignant les insectes et en rendant le bois plus résistant aux parasites.

Les blackhouses faisaient partie d’un mode de vie communautaire où les familles vivaient proches les unes des autres. Les villages étaient souvent composés de plusieurs de ces habitations, formant des hameaux autosuffisants où le travail agricole et l’élevage étaient au centre de la vie quotidienne.

blackhouse d'Arnol

L’évolution et la disparition des blackhouses

Bien que cela puisse sembler être le cas, les blackhouses ne sont pas nommées ainsi en raison de leurs pièces enfumées et des toits noirs, mais parce qu’elles étaient comparées aux nouvelles maisons qui étaient construites à la fin des années 1800. Ces maisons étaient construites avec des pierres et du mortier de chaux plutôt que de la pierre et de la terre et cela présentait un tel contraste que les gens ont commencé à les appeler « maison blanche ». Le terme « maison noire » a été ensuite appliqué sur les vieilles maisons. Les nouvelles « maisons blanches » étaient construites à la suite de règlements plus stricts qui nécessitaient la séparation des êtres humains de leur bétail et des animaux.

En effet, au XIXe siècle, les autorités britanniques ont encouragé la modernisation des maisons rurales. Les conditions sanitaires dans les blackhouses étaient jugées insalubres, notamment à cause de la cohabitation avec les animaux et de l’absence d’évacuation de la fumée. Les nouvelles maisons blanches (white houses), construites avec du mortier et équipées de cheminées, ont progressivement remplacé les blackhouses. Elles étaient perçues comme plus hygiéniques et plus conformes aux normes d’urbanisme.

Incroyablement, quelques-unes des blackhouses étaient encore habitées jusqu’au milieu des années 1970, bien que les constructions plus tardives avaient des foyers et des cheminées. Mais avec l’arrivée de l’électricité et des infrastructures modernes, elles ont été peu à peu toutes abandonnées.

Les blackhouses aujourd’hui

Aujourd’hui, les blackhouses ont disparu en tant qu’habitations principales, mais certaines ont été restaurées à des fins touristiques ou culturelles. Voici quelques exemples à visiter :

  • Le village de Gearrannan (Île de Lewis, Écosse) : ce village traditionnel a été restauré et abrite un musée vivant où les visiteurs peuvent découvrir la vie dans une blackhouse au XIXe siècle. Certaines maisons ont été transformées en hébergements touristiques.
  • Le Blackhouse Museum de Arnol (Écosse) : sur l’île de Lewis, ce musée présente une blackhouse avec son mobilier d’époque et une reconstitution fidèle du mode de vie des habitants.
  • Les Blackhouses en Irlande : en Irlande, les blackhouses étaient moins répandues, mais certains exemples subsistent dans le Connemara et les îles d’Aran. Des initiatives de préservation permettent aux visiteurs d’explorer ces habitations et d’en apprendre davantage sur leur histoire.

La rénovation de certaines blackhouses en maisons de vacances prouve l’intérêt grandissant pour ces constructions. Leur robustesse et leur charme rustique attirent les amateurs d’authenticité.

Les blackhouses sont le reflet d’un mode de vie ancestral, où la communauté et la nature occupaient une place centrale. Bien qu’elles aient disparu au profit de constructions modernes, leur préservation permet aujourd’hui de transmettre un pan de l’histoire écossaise et irlandaise.

Si vous avez l’occasion de visiter l’île de Lewis ou les îles d’Aran, ne manquez pas ces vestiges architecturaux uniques. Ces maisons racontent une histoire, celle d’un peuple qui a su s’adapter à un environnement rude en bâtissant des refuges solides. Si vous souhaitez approfondir vos connaissances sur les blackhouses, plusieurs musées et sites historiques proposent des visites immersives. Certaines maisons sont même disponibles à la location pour vivre l’expérience de ces habitations typiques.

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