Les maisons traditionnelles libanaises

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Les maisons traditionnelles libanaises
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Au Liban, la "maison à salle centrale" et ses variantes forment un corpus cohérent, lisible dans les villes côtières comme dans la montagne. On reconnaît la façade symétrique, la baie à trois arcs, la salle centrale qui distribue les pièces, les plafonds hauts et le toit en tuiles rouges.

Cette architecture vernaculaire libanaise résulte d’un croisement entre savoir-faire locaux, échanges méditerranéens et innovations du XIXᵉ siècle. Voici pourquoi ces maisons gardent un intérêt technique et urbain, et comment les restaurations récentes s’appuient sur des sources solides.

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Un bref panorama typologique

Un bref panorama typologique

Les chercheurs de l’Université américaine de Beyrouth décrivent l’apparition et la diffusion de la "maison beyrouthine" au XIXᵉ siècle, avec sa salle centrale, ses grandes ouvertures et ses toits en tuiles importées de Marseille. Cette forme répond à de nouveaux usages bourgeois et à une sociabilité portée par le balcon sur rue. Elle s’inscrit aussi dans un contexte de modernisation portuaire et commerciale qui relie Beyrouth aux réseaux méditerranéens. Selon les travaux de l’AUB, ce modèle gagne ensuite les villes côtières comme Saïda, Tripoli et Byblos, où il s’adapte aux matériaux locaux et aux contraintes de parcelle.

Le manuel de restauration "Houses of Beirut 1860-1925" synthétise l’évolution : vers 1900, la maison à salle centrale atteint une maturité typologique, avec deux ou trois niveaux, la triple arcade et un toit en pavillon couvert de tuiles. Le document détaille aussi les options structurelles, enduits et menuiseries. Il insiste sur la compatibilité des matériaux et proscrit les substitutions qui bloquent la respiration des maçonneries anciennes, comme les mortiers au ciment. Le guide propose aussi des fiches techniques pour réparer les charpentes pyramidales et restituer les profils de fenêtres selon les gabarits d’origine.

Pour replacer ce modèle architectural dans une perspective historique cohérente, l’ouvrage de Friedrich Ragette publié par l’American University of Beirut sert de base. L’auteur retrace l’évolution des formes domestiques libanaises entre le XVIIIᵉ et le XIXᵉ siècle en partant des maisons à liwân ouvert, inspirées des traditions levantines, puis en analysant les maisons voûtées de montagne adaptées aux terrains escarpés et aux hivers rigoureux. Il décrit enfin l’apparition du plan à salle centrale, plus récent, qui organise les circulations de manière plus lisible, favorise la ventilation et améliore l’éclairage naturel.

Plan, hiérarchie des pièces et circulations

Plan, hiérarchie des pièces et circulations

Le plan s’organise autour d’une salle centrale (dar) qui distribue les pièces principales. La façade devient symétrique et l’axe médian s’aligne souvent sur la triple arcade ouverte vers le paysage ou la rue. Les pièces latérales alternent salons et chambres, avec une hiérarchie claire entre réception et espaces privés.

Des relevés contemporains confirment cette logique. Le Journal of Traditional Building, Architecture and Urbanism documente un plan type où le hall central articule escalier, salons, cuisine et un liwân intégré. Le schéma privilégie la ventilation croisée et une lumière abondante apportée par les baies hautes.

Dans les quartiers de Beyrouth (Gemmayzé, Mar Mikhaël), les balcons s’allongent au tournant du XXᵉ siècle. Les fenêtres s’abaissent, la vie se déplace vers l’extérieur. AUB rappelle ce glissement, en lien avec une classe moyenne de négociants et des pratiques urbaines nouvelles.

Matériaux et structures

Matériaux et structures

La structure associe maçonneries de pierre (calcaire et grès selon les régions) et planchers bois. Le manuel BHI décrit les systèmes de murs, les tirants métalliques, les enduits à la chaux et les assemblages bois-pierre aux étages. Les charpentes à fermes pyramidales reçoivent des tuiles mécaniques.

Sur le plan technique, les plafonds du premier étage reposent souvent sur des solives en résineux importés, localement appelés "qotrani", avec planches et couches de remplissage. Les auteurs du Journal of Traditional Building précisent la composition et relient ce dispositif aux toitures à quatre pentes en tuiles rouges. Les tuiles de Marseille arrivent par la mer à la fin du XIXᵉ siècle. Cette importation s’observe sur l’ensemble du Levant et équipe rapidement toutes les maisons bourgeoises libanaises. Les sources académiques et les rubriques patrimoniales d’AUB l’attestent pour Beyrouth.

Façades, ouvertures et dispositifs climatiques

Façades, ouvertures et dispositifs climatiques

La façade de la maison articule une composition ordonnée où se succèdent une baie tripartite surmontée d’arcs, des rangées de fenêtres élancées et des garde-corps en ferronnerie travaillée. Selon le manuel BHI, cette triple arcade incarne la phase aboutie de la maison beyrouthine, car elle ouvre la salle centrale vers le paysage, filtre la lumière et affirme l’équilibre symétrique de l’élévation principale.

À côté de la triple arcade, le "mandaloun" (fenêtre bifore encadrée d’un petit pilier central et d’un arc de décharge) appartient au vocabulaire montagnard et palatial, déjà signalé par Ragette et par la littérature patrimoniale libanaise. Le dispositif met en scène la façade tout en ménageant lumière et vues.

La performance d’été repose sur plusieurs éléments : hauteurs sous plafond importantes, orientation soignée, percements généreux et circulation d’air via la salle centrale. Les analyses contemporaines des projets-écoles et des chantiers de restauration confirment cette logique bioclimatique.

Variantes régionales et contextes urbains

Variantes régionales et contextes urbains

À Beyrouth et dans les bourgs côtiers, la maison à salle centrale forme des alignements urbains sur parcelle étroite. Les inventaires patrimoniaux (World Monuments Fund) identifient des concentrations d’immeubles de la fin du XIXᵉ et du début du XXᵉ siècle, où se lisent les mêmes éléments.

À Zokak el-Blat, le palais Heneine illustre une variante de maison bourgeoise avec jardins et développements latéraux. La documentation du WMF situe ce bâti dans l’expansion de Beyrouth hors les murs historiques, tout en gardant la logique du hall central et des percements rythmés.

En montagne, l’héritage des maisons traditionnelles voûtées demeure. Friedrich Ragette montre des combinaisons où des espaces voûtés en rez-de-chaussée portent un étage organisé autour d’un hall, avec des maçonneries plus épaisses et des ouvertures plus mesurées selon l’altitude.

Ce que l’on sait des toitures, charpentes et tuiles

Ce que l’on sait des toitures, charpentes et tuiles

Les sources concordent : les toits en pavillon et les charpentes à fermes pyramidales se généralisent à la charnière des XIXᵉ-XXᵉ siècles à Beyrouth. Les tuiles rouges d’origine marseillaise s’imposent pour des raisons d’étanchéité, de diffusion commerciale et d’esthétique. AUB en retrace les filières, et la littérature scientifique en détaille la mise en œuvre et le lien avec les plafonds bois.

Pourquoi ce point compte pour un projet de sauvegarde ? Parce que le diagnostic d’une charpente ancienne doit vérifier le type de ferme, l’essence des bois, l’état des assemblages et la compatibilité des tuiles actuelles avec la structure d’origine. Le manuel BHI précise les pathologies à surveiller (flèches, attaques biologiques, soulèvements de tuiles au vent, corrosion des tirants).

Restaurer aujourd’hui : méthodes, acteurs et exemples

Restaurer aujourd’hui : méthodes, acteurs et exemples

Après l’explosion du 4 août 2020, des maisons à salle centrale ont subi de lourds dégâts. Plusieurs institutions ont coordonné une réponse d’urgence, avec inventaire, étaiement et restauration. La page "Beirut Built Heritage Rescue 2020" animée par des institutions patrimoniales, sous l’égide de la Direction générale des Antiquités (DGA) et avec l’appui de l’UNESCO, de l’ICCROM, d’ICOMOS Liban, d’APSAD et de Blue Shield, décrit ce dispositif. Elle précise les secteurs d’intervention prioritaires et recense les bâtiments protégés par la législation patrimoniale qui présentent un risque d’effondrement.

Le Manuel BHI fournit une méthode pas à pas : relevé, diagnostic structurel, conservation des enduits historiques, reprise des planchers bois et restitution des menuiseries selon profils d’époque. Le document outille les maîtres d’ouvrage et les artisans pour des chantiers conformes aux valeurs architecturales d’origine. Des chantiers récents illustrent cette approche, en voici trois beaux exemples :

1. La "Blue House" à Beyrouth

1. La "Blue House" à Beyrouth

La "Blue House" à Beyrouth figure parmi les chantiers emblématiques ouverts après l’explosion du port en 2020. Cette maison à salle centrale du début du XXᵉ siècle conserve une façade rythmée par une triple arcade et un vocabulaire décoratif soigné, typique du quartier d’Achrafieh.

La Direction générale des Antiquités et le Beirut Heritage Initiative dirigent la restauration avec le soutien financier de la Honor Frost Foundation. L’intervention vise la consolidation des planchers bois, la reprise des murs fissurés, la restauration des enduits à la chaux et la restitution des menuiseries traditionnelles. Le projet s’appuie sur un relevé complet des éléments décoratifs d’origine, dont les garde-corps en fer forgé et les vitraux colorés, afin de préserver l’identité architecturale du bâtiment.

2. Le "Gholam Heritage Cluster" à Beyrouth

2. Le "Gholam Heritage Cluster" à Beyrouth

Le programme "Gholam Heritage Cluster" mené par l’AUB Neighborhood Initiative est un autre chantier de référence dans la sauvegarde de l’architecture domestique à Beyrouth. Situé le long d’un escalier patrimonial de Mar Mikhaël, l’ensemble regroupe plusieurs maisons construites entre la fin du XIXᵉ siècle et le début du XXᵉ siècle. Les équipes locales interviennent sur les pathologies structurelles les plus critiques comme la déformation des planchers et les fissures traversantes des murs porteurs en pierre.

Le projet se distingue aussi par son volet pédagogique : il associe apprentis et artisans pour réactiver des savoir-faire en maçonnerie traditionnelle, charpente bois et enduits à la chaux. Cette démarche favorise la transmission des techniques et renforce les compétences locales dans un contexte urbain fragile.

3. Le site "Medawar 749" à Beyrouth

3. Le site "Medawar 749" à Beyrouth

Le site "Medawar 749" à Beyrouth, régulièrement cité dans la presse libanaise, illustre une approche expérimentale de la restauration patrimoniale. Il s’agit d’une maison de la fin du XIXᵉ siècle gravement endommagée par l’explosion du port. Plutôt qu’un chantier classique confié à une seule entreprise, le projet adopte une méthode dite "par l’école" qui associe restauration et formation.

Des apprentis issus d’ateliers locaux interviennent aux côtés de professionnels confirmés pour réapprendre des gestes anciens, comme la taille de pierre calcaire, la pose de voûtes ou la réparation de menuiseries anciennes. Cette stratégie répond à une urgence patrimoniale mais aussi sociale, car elle crée un réseau de compétences indispensables pour la sauvegarde des maisons traditionnelles libanaises.

Pour les contextes post-catastrophe, l’orientation ICOMOS-ICCROM recommande d’adapter la reconstruction au sens du lieu, en privilégiant réparations réversibles, matériaux compatibles et lisibilité des interventions. Ces lignes guident les équipes libanaises dans les quartiers touchés.

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Themes: Liban

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