La Casa Verde à Malabo : un joyau patrimonial sauvé de l’oubli

La Casa Verde (maison verte) est située au cœur de Malabo, la capitale de la Guinée équatoriale qui se trouve sur l'île de Bioko. Datant du milieu des années 1800, le bâtiment était autrefois l'ambassade du Portugal. La Casa Verde abrite un certain nombre d'entreprises, et elle a récemment subi une rénovation majeure. Cette maison d'un vert profond a été préfabriquée en Belgique au début du 19ème siècle et a été récemment restaurée. C'est un point de repère important qui est hautement considéré à Malabo.

Située à quelques pas de la cathédrale Santa Isabel et du front de mer, la Casa Verde fait partie des édifices emblématiques qui parlent de l’évolution urbaine de Malabo depuis le XIXᵉ siècle. Préfabriquée en Europe avant d’être assemblée sur l’île de Bioko, elle illustre l’ingéniosité constructive importée par les puissances coloniales tout en s’adaptant au climat équatorial grâce à ses galeries couvertes, ses larges débords de toiture et ses persiennes destinées à favoriser la ventilation naturelle.

Avec sa silhouette en bois, ses lambrequins décoratifs et son balcon périphérique, elle représente un témoignage rare et remarquablement conservé de l’architecture coloniale de Malabo, aujourd’hui menacée par la modernisation rapide de la ville et la disparition progressive du bâti ancien.

Une architecture coloniale préfabriquée venue d’Europe

La Casa Verde appartient à une typologie rare en Afrique centrale : celle des maisons coloniales préfabriquées en bois importées depuis l’Europe. Selon l’UNESCO – Inventaire du Patrimoine Architectural de Guinée équatoriale (Programme PEOPLES, 2010), plusieurs bâtiments de Malabo (anciennement Santa Isabel) furent importés en kit et montés sur place par des artisans européens et locaux.

La Casa Verde aurait été construite en Belgique puis transportée par bateau jusqu'à l’île de Bioko autour de 1855–1862, période durant laquelle la ville se développe sous influence coloniale espagnole tout en accueillant des investisseurs portugais et anglais impliqués dans le commerce maritime.

Les éléments caractéristiques de cette architecture sont visibles sur les photos :

• structure en bois peint de couleur verte, typique des maisons tropicales coloniales.
• balcons périphériques favorisant la ventilation naturelle en climat équatorial humide.
• fenêtres cintrées à persiennes offrant lumière et protection contre les pluies abondantes.
• décors de lambrequins découpés sous les avant-toits, héritage du style victorien tropical adopté dans les colonies européennes aux XIXᵉ-XXᵉ siècles ;
• colonnettes en fonte importées, combinant esthétique et stabilité structurelle.

D'après un rapport de l’Université Nationale de Guinée équatoriale (UNGE), les techniques de montage de la Casa Verde s’apparentent à celles utilisées pour les maisons démontables de l’ingénieur français Jean Prouvé un siècle plus tard, préfigurant les méthodes de construction industrialisée. Cela fait de ce bâtiment un document architectural exceptionnel, témoin des débuts de la préfabrication coloniale.

Une restauration emblématique

La Casa Verde a fait l’objet d’un programme de restauration patrimoniale soutenu par l’Union européenne entre 2011 et 2014, dans le cadre du Programme d’Appui à la Culture et au Patrimoine de Guinée équatoriale (ACP-EU/UNESCO). L’objectif était de sauvegarder une icône du centre historique de Malabo et de relancer son usage économique local. Le chantier a permis :

• la consolidation des fondations fragilisées par l’humidité ;
• le traitement antifongique des bois d’origine ;
• la restauration fidèle des colonnades et balustrades ;
• la pose d’une nouvelle couverture métallique ventilée adaptée au climat tropical ;
• la restitution des menuiseries blanches et verts historiques, emblématiques du bâtiment.

Selon les Actes du séminaire UNESCO sur le patrimoine urbain de Malabo (2015), ce chantier a été conçu comme une école de restauration, formant plus de 30 artisans locaux aux techniques traditionnelles de menuiserie, charpente et ferronnerie. Il s’agissait de préserver les savoir-faire et de favoriser l’emploi local.

Depuis la fin des travaux, la Casa Verde est considérée comme un symbole de la mémoire architecturale de Malabo. Située près du port et de la cathédrale Santa Isabel, elle contribue à l’attractivité culturelle du centre historique, aujourd’hui menacé par la densification urbaine et le remplacement progressif du bâti ancien par des constructions en béton. Elle démontre qu’un bâtiment ancien peut encore servir.